Supervues - Cathryn Boch

"L’hôtel est communément un lieu de passage, un lieu d’étape. Dans l’imaginaire collectif, c’est un ailleurs, un lieu extra-ordinaire, cadre idéal de fictions. Si le cinéma et la littérature on pu en traiter le potentiel dramaturgique, les artistes sont également nombreux à avoir explorer les mythes sous-jacents qu’il incarne, et ce depuis le début du XIXe siècle. De sujet pour les peintres, l’hôtel est devenu objet de propositions artistiques pour les artistes contemporains.

Aujourd’hui, les hôtels n’accueillent plus seulement des visiteurs ou des artistes de passage, ils ouvrent leurs espaces publics et privés à la création, éphémère ou pérenne, s’associent aux plus grands événements de l’art contemporain. Supervues ne procède pas de cette dernière dynamique, dans la mesure où il est l’événement, il est l’hôte par et avec excellence, une petite surface de l’art contemporain, à dimension humaine, inscrit dans un rapport de proximité. Hôteliers et amateurs d’art, Laurence et Jean-Baptiste Gurly, se sont entourés dès le début de cette aventure de collectionneurs et d’artistes pour créer de manière collective un rendez-vous professionnel, de qualité et convivial.

L’hôtel Burrhus, hôtel atypique au cœur de Vaison-la-Romaine, est doté de 35 chambres, chacune d’entre elles possédant des dimensions, un mobilier et une atmosphère unique. Depuis 2007, le second week-end de décembre, l’hôtel Burrhus invite des institutions, centres d’art, lieux d’art contemporain, galeries, à réfléchir et à participer à la programmation de Supervues en proposant à un artiste d’investir l’une des chambres de l’hôtel. Investir une chambre, tirée au sort, avec ses œuvres, installations conçues spécialement pour l’événement, voire des performances. L’habiter, vivre pendant trois jours parmi sa propre création, au contact des artistes voisins, tout en étant le médiateur de son propre travail pour un public toujours plus curieux et nombreux avec près de 1200 visiteurs lors de l’édition 2013. Au dernier étage, la « suite » accueille une sélection d’œuvres d’un collectionneur. La manifestation est ponctuée de temps forts (performances, projections, concerts) et de parcours proposés par des complices de toujours : collectionneurs, galeristes, artistes. C’est une expérience emprunte de générosité, où les maître-mots restent le partage et la rencontre, à laquelle les artistes et les visiteurs sont invités à prendre part"

Diane Pigeau, 2014

Le Frac invite Cathryn Boch

Les œuvres de Cathryn Boch sont une invitation à la découverte d’un territoire charnel et tactile, d’un atlas fertile, à la fois concret et fictionnel, personnel et universel. C’est le parcours du corps, le trajet dessiné par les bras de l’artiste qui font la destination. Plus de points cardinaux, de sens de lecture mais des signes et symboles qui s’ouvrent au regard, offrant une possibilité de s’y rattacher et de s’y repérer. Cette agitation vibrionnaire faite de trajectoires, d’intersections, de chocs, d’écartements, de reliefs, de fils en lignes ou en amas et de fragments de cartes cousues, tendues jusqu’à la déchirure, pliées, dépliées, manipulées, sculptées construisent une sismographie visuelle, tellurique, qui laisse imaginer quelle intensité physique sous-tend la réalisation de ces œuvres.

Cathryn Boch dessine sans relâche un univers à la mesure de son imagination puisant dans l’usage de cette riche palette de teintures noires une expérience picturale nouvelle où ombres et lumières renforcent cette sensation de sédimentation du motif et de stratification de la mémoire. C’est pourtant bien la singularité d’une existence qui s’imprime, en même temps que quelque chose de plus général qui nous unit et nous touche : une obstination de l’être. Pascal Neveux, Extrait de Une archéologie du sensible ; Texte à paraître dans la monographie de Cathryn Boch, décembre 2016